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Курс французского языка 4 том Г. Може; (стр. 30 из 81)

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battre et même punir d'un châtiment mérité un de ses «enfants». Il le sait
bien; et eux aussi le savent. Ils voudraient donc le retenir, mais ils n'en 0nt
pas besoin, car dans la même pensée il reste leur tenir compagnie le plus
longtemps possible; et il ne les quitte qu'en leur promettant de revenir
bientôt. Du haut du coursier, il regarde encore les cent, les deux cents
terribles visages qui rayonnent de sa lumière*...

HENRI LAVEDAN. Monsieur Vincent aumônier des galères (1928
Примечания:

1. Где стоят на якоре. 2. Ou la coursive, переход, соединяющий нос и корму галер,
над скамьями, к которым прикованы каторжники. 3. S'ils sont...

Вопросы:

* Montrez l'effet de vigueur et de naturel obtenu par un adroit emploi du style direct.

L'ABBÉ JEANNE

Le christianisme social, et si l'on veut militant, n'a point attendu le XXesiècle
pour faire son apparition en France. Vincent de Paul déjà, et surtout cet étonnant
mouvement que déclenchèrent aux environs de
1840 un Lamennais, un
Lacordaire, un Ozanam, qui fonda la Société Saint-Vincent-de-Pa'ul, témoignent
assez de cet élan de charité active, qui a poussé tant de prêtres français à se
rapprocher du peuple et qui a même inspiré à certains d'entre eux l'idée
courageuse de partager effectivement la condition ouvrière...
Dans l'un de ses ouvrages, qu'il a consacré aux Humbles, JULES ROMAINS s'est plu
à imaginer un apôtre de ce genre: l'abbé Jeanne, qui ne dédaigne pas d'aller
dans les quartiers populaires porter aide à une jeune maman dans la misère.

L'abbé frappe à la porte. Il entend crier: «Entrez!» par une voix qu'il
reconnaît.

«Oh! c'est vous, monsieur l'abbé!»

Une jeune femme, à demi couchée sur un grabat qui touche au sol.
écarte de sa poitrine l'enfant qu'elle allaitait, et se couvre vivement le sein
avec un torchon à rayure rouge.

«Continuez, je vous prie, de nourrir votre enfant», dit Jeanne.

Elle hésite, sourit d'un air confus, réussit presque à rosir dans sa pâleur;
puis elle reprend son enfant, écarte le torchon, et laisse voir un sein très

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peu gonflé, aux attaches maigres, à la peau brunâtre, un pauvre sein
rarement lavé.

«Vous allez mieux? dit Jeanne.

— Oui, un peu.

— Et le petit se nourrit bien?

— Il se nourrirait bien, mais c'est moi qui ai très peu de lait. Asseyez-
vous donc, monsieur l'abbé.»

Il s'assied sur la chaise unique, dont le paillage crevé laisse pendre ses
entrailles, puis il commence à défaire les ficelles de son paquet.

«Je vous ai apporté une ou deux petites choses. Oh! ce n'est presque
rien,, malheureusement. D'abord j'ai remarqué que vous aviez beaucoup de
peine à faire chauffer ce qu'il vous faut sur ce réchaud à charbon de bois.
Et puis le charbon de bois, ce n'est pas très sain pour vous ni pour votre
enfant. Je vous ai donc apporté un petit réchaud à alcool. Le
fonctionnement est très simple. Je vous montrerai (...). Dans cette boîte-ci,
vous avez un certain nombre de doses de potage condensé. Je ne vous dis
pas que ce soit bien merveilleux. Mais ça contient tout de même des
principes nutritifs, et c'est tellement facile à préparer. D'ailleurs, nous
allons faire un essai, si vous permettez. Ne vous dérangez pas. Où est-ce
que je trouverai un peu d'eau?

— Dans cette casserole, sous la brique, à côté de vous, monsieur
l'abbé. — L'eau est propre? D'où vient-elle?

— C'est un voisin qui me l'a donnée, hier. Il va la chercher à une
fontaine... oh! assez loin d'ici... en tirant1 sur Saint-Ouen.

— Vous voyez comme le réchaud est facile à allumer. Je puis me servir
de la casserole? Dès que l'eau va bouillir, j'y verserai le contenu d'une de
ces petites boîtes. Dites-moi où je trouverai une cuiller, et une tasse.

— Je n'ai plus de tasse. Il doit y avoir deux bols l'un dans l'autre, par
terre, derrière vous.»

La flamme bleue danse comme un esprit favorable. L'enfant pousse
parfois un gémissement. Le prêtre surveille l'eau, attend les premières
bulles. Il jette un peu d'eau dans le plus grand des deux bols, le rince
discrètement; puis, après une hésitation, en fait autant pour l'autre.

«Ça m'ennuie de vous laisser faire ça, monsieur l'abbé. Si j'avais su, je
me serais levée avant que vous ne soyez là.

— Mais non. J'en ai l'habitude. Chez moi, je n'ai pas toujours quelqu'un
Pour me servir*.»

JULES ROMAINS. Les Hommesde Bonne Volonté, Les Humbles (1933).

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Примечания:

1. En allant dans la direction de Saint-Ouen.

Вопросы:

* Montrez que la charité lie l'abbé Jeanne est une charité efficace et active.

Soulignez la simplicité, très expressive, du style et du vocabulaire.

VOCATION DES CARMÉLITES

Nombreuses sont les Françaises qui entrent en religion. Et le dévouement que
certaines (l'entre elles, les Petites Sœurs des Pauvres notamment, apportent
à soigner les malades, les orphelins, les infirmes, les vieillards, force l'admira-
tion générale.

De toutes les religieuses, il en est peu qui obéissent à une yègle aussi sévère
que les Carmélites. Mais c'est de cette rigueur même qu'elles tirent l'essentiel
de leur courage. Il revenait au génie brûlant de GEORGES BERNANOS d'exalter
cette héroïque vertu, ainsi qu'on le verra dans la scène où l'écrivain met en
présence la Prieure du Carmel de Compiègne et la jeune Blanche de la Force,
qui, en pleine période révolutionnaire, sollicite son admission dans la sainte
maison.

LA PRIEURE1. — Qui vous pousse au Carmel?

BLANCHE. — Votre Révérence m'ordonne-t-elle de parler tout à fait
franchement?

LA PRIEURE. — Oui.

BLANCHE. — Hé bien, l'attrait d'une vie héroïque.

LA PRIEURE. — L'attrait d'une vie héroïque, ou celui d'une certaine
manière de vivre qui vous paraît — bien à tort — devoir rendre l'héroïsme
plus facile, le mettre pour ainsi dire à la portée de la main?..

BLANCHE. — Ma Révérende Mère, pardonnez-moi, je n'ai jamais fait de
tels calculs.

LA PRIEURE. — Les plus dangereux de nos calculs sont ceux que nous
appelons des illusions...

BLANCHE. — Je puis avoir des illusions. Je ne demanderais pas mieux
qu'on m'en dépouille.

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LA PRIEURE. — Qu'on vous en dépouille... (Elle appuie sur les trois
mots.) Il faudra vous charger seule de ce soin, ma fille. Chacune ici a déjà
trop à faire de ses propres illusions. N'allez pas vous imaginer que le
premier devoir de notre état soit de nous venir en aide les unes aux autres,
afin de nous rendre plus agréables au divin Maître, comme ces jeunes
personnes qui échangent leur poudre et leur rouge avant de paraître pour le
bal. Notre affaire est de prier, comme l'affaire d'une lampe est d'éclairer. Il
ne viendrait à l'esprit de personne d'allumer une lampe pour en éclairer une
autre. «Chacun pour soi», telle est la loi du monde, et la nôtre lui ressemble
un peu: «Chacun pour Dieu!» Pauvre petite! Vous avez rêvé de cette
maison comme un enfant craintif, que viennent de mettre au lit les
servantes, rêve dans sa chambre obscure à la salle commune, à sa lumière,
à sa chaleur. Vous ne savez rien de la solitude où une véritable religieuse
est exposée à vivre et à mourir. Car on compte un certain nombre de vraies
religieuses, mais bien davantage de médiocres et d'insipides. Allez, allez!
ici comme ailleurs le mal reste le mal, et pour être faite d'innocents
laitages, une crème corrompue ne doit pas moins soulever le cœur qu'une
viande avancée... Oh! mon enfant, il n'est pas selon l'esprit du Carmel de
s'attendrir, mais je suis vieille et malade, me voilà très près de ma fin, je
puis bien m'attendrir sur vous... De grandes épreuves vous attendent, ma
fille*...

BLANCHE. — Qu'importé, si Dieu donne la force!
(Silence.)

LA PRIEURE. — Ce qu'il veut éprouver en vous, n'est pas votre force,
mais votre faiblesse...

(Silence.)

... Les scandales que donne le monde ont ceci de bon qu'ils révoltent les
âmes comme la vôtre. Ceux que vous trouverez ici vous décevront. A tout
prendre, ma fille, l'état d'une religieuse médiocre me paraît plus déplorable
que celui d'un brigand. Le brigand peut se convertir, et ce sera pour lui
comme une seconde naissance. La religieuse médiocre, elle, n'a plus
a naître, elle est née, elle a manqué sa naissance, et, sauf un miracle, elle
restera toujours un avorton2.

GEORGES BERNANOS. Dialogues des Carmélites, 2etableau, scène 1 (1949).

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Примечания:

1. Приоресса, настоятельница монастыря. 2. Недоноском, т.е. слабым, болезнен
ным ребенком.

Вопросы:

* Dans cette tirade de la prieure, appréciez la justesse, la force des images et des
comparaisons.

L'ESPRIT DE PORT-ROYAL

Ce qu'il y a -parfois d'allier et d'indomptable dans un certain catholicisme
français ne s'est jamais mieux incarné que dans ces religieuses et ces Messieurs
de Port-Royal, qui refusèrent de s'incliner devant les plus hautes autorités et
qu 'un roi tout-puissant persécuta sans parvenir à les faire plier.
SAINTE-BEUVE (1804 - 1869), qui consacra plusieurs années de sa vie à étudier
et à écrire l'histoire de Port-Royal, a dégagé avec force les raisons profondes
de la rigueur janséniste: loin de n'être qu'une pureté toute formelle, c'eut
l'avenir même du christianisme qu'elle visait à sauvegarder.

Théologiquement d'abord, Port-Royal, nous le verrons, eut la plus
grande valeur. Dans son esprit fondamental, dans celui de la grande
Angélique' (comme on disait) et de Saint-Cyran2 il fut à la lettre une
espèce de réforme en France, une tentative expresse de retour à la sainteté
de la primitive Église sans rompre l'unité, la voie étroite dans sa pratique la
plus rigoureuse, et de plus un essai de l'usage en français des saintes
Écritures et des Pères3, un dessein formel de réparer et de maintenir la
science, l'intelligence et la Grâce4. Saint-Cyran fut une manière de Calvin
au sein de l'Église catholique et de l'épiscopat gallican5 un Calvin restau-
rant l'esprit des sacrements, un Calvin intérieur à cette Rome à laquelle il
voulait continuer d'adhérer*. La tentative échoua, et l'Église catholique
romaine y mit obstacle, déclarant égarés ceux qui voulaient à toute force, et
tout en la modifiant, lui demeurer soumis et fidèles.

Port-Royal, entre le seizième et le dix-huitième siècle, c'est-à-dire deux
siècles volontiers incrédules, ne fut, à le bien prendre, qu'un retour et un
redoublement de foi à la divinité de Jésus-Christ. Saint-Cyran, Jansénius6
et Pascal furent tout à fait clairvoyants et prévoyants sur un point: ils
comprirent et voulurent redresser à temps la pente déjà ancienne et presque
universelle où inclinaient les esprits. Les doctrines du pélagianisme7 et

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surtout du semi-pélagianisme avaient rempli insensiblement l'Église, et
constituaient le fond, l'inspiration du christianisme enseigné. Ces doctrines
qui, en s'appuyant de la bonté du Père et de la miséricorde infinie du Fils,
tendaient toutes à placer dans la volonté et la liberté8 de l'homme le
principe de sa justice et de son salut, leur parurent pousser à de prochaines
et désastreuses conséquences. Car, pensaient-ils, si l'homme déchu9 est
libre encore dans ce sens qu'il puisse opérer par lui-même les
commencements de sa régénération et mériter quelque chose par le
mouvement propre de sa bonne volonté, il n'est donc pas tout à fait déchu,
toute sa nature n'est pas incura-blement infectée; la Rédemption toujours
vivante et actuelle par le Christ ne demeure pas aussi souverainement
nécessaire. Étendez encore un peu cette liberté comme fait Pelage, et le
besoin de la Rédemption surnaturelle a cessé. Voilà bien, aux yeux de
Jansénius et de Saint-Cyran, quel fut le point capital, ce qu'ils prévirent
être près de sortir de ce christianisme, selon eux relâché, et trop concédant
à la nature humaine. Ils prévirent qu'on était en voie d'arriver par un
chemin plus ou moins couvert,... où donc? à Y inutilité du Christ-Dieu**.
A ce mot, ils poussèrent un cri d'alarme et d'effroi. Le lendemain du
seizième siècle, et cent ans avant les débuts de Montesquieu et de Voltaire,
ils devinèrent toute l'audace de l'avenir; ils voulurent, par un remède
absolu, couper court et net à tout ce qui tendait à la mitigation10 sur ce
dogme du Christ-Sauveur. Il semblait qu'ils lisaient dans les définitions de
la liberté et de la conscience par le moine Pelage les futures pages
éloquentes du Vicaire savoyard11, et qu'ils les voulaient abolir.