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Курс французского языка 4 том Г. Може; (стр. 65 из 81)

BOB7', voulant s'interposer.
M...m...m...

JÉRÔME

Ah! non, vous, mon petit, fichez-moi la paix, n'est-ce pas9..
(A Mêlante:) Si vous étiez une Laroche, une vraie, vous tiendriez de vos
ancêtres le respect qu'ils ont eu pour l'argent! Oui, pour l'argent!.. Ils ne le
jetaient pas par la fenêtre, eux, ils ne le gaspillaient pas comme vous, en
gestes inutiles: ils savaient que c'était dur à amasser et que ça valait la
peine d'être conservé, quand ce ne serait que par égard pour leurs
prédécesseurs qui s'étaient échinés8 à le faire entrer dans la caisse! Ils ne
s'amusaient pas, ces gens-là; ils ne passaient pas leur temps à chercher
comment ils pourraient bien se distraire: ils travaillaient! Il faut choisir
dans la vie entre gagner de l'argent et le dépenser: on n'a pas le temps de
faire les deux*. Eux, ils choisissaient de le gagner. Et ils prenaient des
femmes de leur espèce, des femmes qui leur ressemblaient, des femmes
laides et ennuyeuses, peut-être, mais sages, économes, et capables de tenir
une maison. Pas des amoureuses, bien sûr, ni des mondaines assoiffées de
réceptions: des épouses, des mères, des associées!.. Leurs enfants n'étaient
pas toujours très beaux et leur intérieur manquait de charme. Qu'est-ce que
ça fait? La maison, on y va manger et dormir; pour se distraire, il y a le
bureau!.. Voilà ce que c'étaient que les Laroche! Ils étaient riches: ils le
méritaient... comme vous méritez d'être pauvre, vous qui leur ressemblez si
peu!.. On dira que vous êtes une victime de la crise, que c'est la crise qui
vous a ruinée: allons donc!

Les Laroche avaient tout prévu, même les crises, et leur maison devait y
résister, mais ce qu'ils n'avaient pas prévu, c'est qu'il y aurait un jour
quelqu'un comme vous pour leur succéder!..

MÉLANIE, se tournant vers Suzy et Marcel9.

Il a raison, vous savez! Tout ça vient de ce que je n'ai jamais vraiment
aimé l'argent.

JÉRÔME
II n'y a pas de quoi vous en vanter!

MÉLANIE
Mais je ne m'en vante pas!

384


JÉRÔME

Si! Vous trouviez que ça faisait bien, que ça faisait élégant!.. Oh! vous
n'êtes pas la seule dans ce cas-là! Il y en a beaucoup comme vous! Et c'est
de ça que la bourgeoisie est en train de crever, vous entendez? C'est d'être
devenue dépensière, prodigue, désintéressée! Les bourgeois ne sont pas
faits pour ça! Ils sont faits pour être avares et pour avoir de l'argent. Le jour
où ils n'en ont plus, ils sont inutiles; ils n'ont plus qu'à disparaître de la
circulation**!

Acte IV.

Примечания:

1. Она предложила отдать для удовлетворения кредиторов все имущество, принад-
лежавшее лично ей. 2. Одно из знаменитейших зданий в Париже. Там, в знак благо-
дарности Отечества, погребают "великих людей". 3. Удовлетворить кредиторов.
4. Заместитель директора в фирме Лароша, которому Мелани только что доверила
управление своими делами. 5. Брат Жерома, тип бескорыстного человека. 6. Девичья
фамилия Мелани. 7. Сын Мелани, страдающий тяжелым заиканием. 8. Разговорное
выражение, соответствующее русскому "горбатиться, рвать пупок", т.е надрываться
на работе. 9. Их дочь Анна замужем за Бобом Ларошем, сыном Мелани.

Вопросы:

* Que pensez-vous du cette formule? Que nous apprend-elle sur les intentions de
l'auteur?

** Relevez et étudiez les divers éléments satiriques contenus dans cette seine.

ARMAND SALACROU (né en 1895)

// y avait une bonne dizaine d'années déjà qu'ARMAND SALACROU, auteur de
L'Inconnue d'Arras (1935), d'Un Homme comme les autres (1936), de La Terre
est ronde (1938), s'était imposé au tout premier rang des écrivains de théâtre
de sa génération, quand l'idée lui vint de porter à la scène le drame de la
Résistance française.

Il le fit à sa manière, en bouleversant l'ordre du temps, en ressuscitant les
morts et en les mêlant aux vivants. Mais il sut trouver les mots capables
d'exprimer ce sursaut de l'honneur, qui avait dressé l'immense majorité des
Français contre les forces d'occupation.

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LES NUITS DE LA COLÈRE (1946)

Jean, résistant traqué, est venu chercher refuge chez Bernard, un ami d'enfance. Il lui
explique ce qui l'a poussé à lutter contre l'occupant.

JEAN. — A travers l'Europe nous sommes une multitude d'hommes tout
seuls qui ne se résigneront jamais et qui lutteront jusqu'à la mort.

BERNARD. — Eh bien, méprise-moi, mais je déteste l'idée de la mort.
J'aime la vie, je veux vivre avec ma femme et mes gosses.

JEAN. — Oui, je te méprise et ce que je méprise le plus en toi, c'est ta
bêtise. Tu ne comprends donc pas que, tant qu'ils1 seront là, tu ne pourras
jamais vivre et que, s'ils restent là, tes enfants ne pourront pas vivre?

BERNARD. — Allons donc! On vit toujours, plus ou moins bien, voilà
tout. Et tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir2.

JEAN. — Non, dans cette nuit qui n'en unit pas, il n'y a d'espoir que dans
la lutte.

BERNARD. — Une lutte qui te conduit à la mort, tout droit.
JEAN. — Eh bien, plutôt mourir debout que vivre à genoux.

BERNARD. — Et quand tu seras mort, debout, que pourras-tu encore
espérer?

JEAN. — Que mes enfants vivront libres. Et veux-tu me dire à quoi
ressemblerait le visage de notre pays lorsque le soleil se lèvera par-dessus
cette nuit qui nous étouffe si aucun homme de chez nous ne se révoltait?
Quoi! attendre tous, les bras croisés par la peur, que d'autres hommes
viennent nous délivrer? Voilà où serait notre défaite, cette fois définitive.

BERNARD. — Mon petit Jean, tu es un obsédé de la défaite. Nous
sommes battus, c'est entendu, mais je ne me sens pas du tout humilié, mon
vieux, chacun son tour, ils l'ont été, nous le sommes, ils le seront.

JEAN. — Non, ceux-là sont des mots dépassés3 je suis antinazi comme
on était huguenot4 contre les papistes au temps où les religions étaient
vivantes.

BERNARD. — Tu veux ressusciter les guerres de religion? au nom de
quoi?

Mais quelle est ta religion?

JEAN. —La liberté*.

BERNARD. — Tu es devenu complètement fou.

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JEAN. — Oui, j'ai cru que j'allais devenir fou; mais après m'avoir
accablé, le désespoir m'a révolté, la révolte m'a uni à d'autres révoltés et
c'est maintenant une merveilleuse camaraderie.

BERNARD. — Toi, tu veux te faire tuer pour que d'autres soient heureux
sur la terre quand tu n'y seras plus.

JEAN. — Si tu connaissais la douceur, le repos d'une camaraderie
d'hommes.

BERNARD. — Et Louise?

JEAN. — Parce que je l'aime, je veux lui épargner cette honte d'être
mariée à un homme qui accepte tout pour cette seule raison qu'il a peur.
BERNARD. — Ainsi Louise te pousse à cette aventure?
JEAN. — Nous n'en parlons jamais, mais elle pense comme moi et
lorsqu'elle saura plus tard, je sais qu'elle m'approuvera...

BERNARD. — ... De risquer ta vie, la prison, le déshonneur?
JEAN. — Le déshonneur. ( Un silence. Il reprend.) Par certains mots, par
certains silences, je sais que Louise est ma meilleure camarade de combat.

BERNARD. — De combat! Pauvre Louise! Ah! Je voudrais bien voir la
tête de tes autres copains, ils doivent être jolis.

JEAN. — Ils te déplairaient sûrement. Tu n'as jamais beaucoup aimé les
révoltés.

BERNARD. — C'est vrai.
JEAN. — Tu as toujours été un conservateur.
BERNARD. — Et je m'en vante.

JEAN. — Mais conservateur de quoi? Du désordre social? de l'injustice?
de la misère? du chômage? Conservateur de l'esclavage? Moi, même si
j'étais né marchand d'esclaves, j'eusse été contre l'esclavage.

BERNARD. — Et ta charité qui eût été chrétienne il y a des siècles,
aujourd'hui te pousse à jeter des bombes.

JEAN. — Quand, plus tard, tu sauras qui travaille avec nous, tu seras bien
épaté5

BERNARD. — On coudoie6 des archevêques dans ta bande?
JEAN. — Les archevêques sont assez rares, mais des curés on en trouve,
et plus que tu ne penses.

BERNARD. — Naturellement, les curés se fourrent7 partout. Mais il y a

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aussi des communistes, j'imagine?
JEAN. — On le dit.
BERNARD. — Et vous êtes armés?
JEAN. — Il paraît.

bernard. — Eh bien! si les troupes allemandes devaient déguerpir d'un
seul coup, ce serait du joli en France! Une fameuse explosion!
JEAN. —Si tu pouvais dire vrai!

bernard. — Tu es inconscient. Alléz, va te recoucher et demain
matin...

JEAN. —Je pars au soleil levant*.

IIepartie
Примечания:

1. Немецкие оккупанты. 2. Пословица. Бернар в данном случае демонстрирует
свою душевную низость. 3. Il faut comprendre: ce sont là des mots dépassés 4. Протес-
танты-кальвинисты. Паписты — сторонники папы римского, т.е. католики. Эти пар-
тии были противниками в религиозных войнах во Франции в XVIв. 5. Поражен,
изумлен (разг.) 6. Встречаются, имеются. Littéralement: on heurte du coude. 7. Прони-
кают, влезают(разг.)

Вопросы:

* Dans quelle mesure la liberté peut-elle devenir une religion?

** Quelles sont les différentes raisons qui ont poussé Jean dans la Résistance?

HENRY DE MONTHERLANT (né en 1896)

il est certainement un des plus importants prosateurs que la France ait
produits depuis Chateaubriand. MONTHERLANT n'était encore qu'un tout jeune
homme que Romain Rolland le saluait comme «la plus grande force qui existât
dans les lettres françaises».

Assez curieusement, dans la seconde partie de sa carrière, le romancier des
Bestiaires (1926) et des Jeunes Filles (1936-1939) s'est tourné vers le théâtre
pour y donner comme de nouveaux prolongements à son œuvre. Mais, écrivant
pour la scène, il est resté fidèle à ce sens royal du grand style qui confère à une
œuvre telle que Le Maître de Santiago une place éminente dans la littérature
dramatique de notre temps.

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LE MAÎTRE DE SANTIAGO (1945)

Vargas, Bernai, Obregon et Olmeda sont venus trouver Alvaro, Maître de l'Ordre de
Santiago, pour le prier d'accepter, aux Indes (c'est-à-dire en Amérique) nouvellement
conquises par l'Espagne, un poste destiné à rétablir sa fortune.

VARGAS. — Chrétien comme vous l'êtes1, allez donc au bout de votre
christianisme. Il y a trois mille ans que des nations périssent. Trois mille
ans que des peuples tombent en esclavage... Le chrétien ne peut pas
prendre tout à fait au tragique ces malheurs-là. Si vous êtes conséquent, il
n'y a qu'une patrie, celle que formeront les Élus.

ALVARO. — Je garde l'autre pour en souffrir.

BERNAL. — Vous condamnez votre temps comme le font les très vieux
hommes. Vous n'avez pas cinquante ans, et vous parlez comme si vous en
aviez quatre-vingts. Et vous exagérez beaucoup. Si vous participiez
davantage, aux événements, si vous étiez plus informé de ce qui se passe...

ALVARO. — J'en ai assez. Chaque fois que je pointe2 la tête hors de
macoquille, je reçois un coup sur la tête. L'Espagne n'est plus pour moi que
quelque chose dont je cherche à me préserver.

BERNAL. — Oui, mais à force de vous retrancher, le monde vous
apparaît déformé par votre vision particulière. Ensuite vous rejetez une
époque, faute de la voir comme elle est.

OBREGON. — Debout sur le seuil de l'ère nouvelle, vous refusez d'entrer.

ALVARO. — Debout sur le seuil de l'ère nouvelle, je refuse d'entrer.

VARGAS. — Mettons que ce soit héroïsme de consentir à être seul, par
fidélité à ses idées. Ne serait-ce pas héroïsme aussi de jouer son rôle dans
une société qui vous heurte, pour y faire vaincre ces idées qui, si elles ne
s'incarnent pas, demeureront plus ou moins impuissantes?

BERNAL. — Et puis, ce qui est humainement beau, ce n'est pas de se
guindér3, c'est de s'adapter: ce n'est pas de fuir pour être vertueux tout à son
aise, c'est d'être vertueux dans le siècle, là où est la difficulté.

ALVARO. — Je suis fatigué de ce continuel divorce entre moi et tout ce
qui m'entoure. Je suis fatigué de l'indignation. J'ai soif de vivre au milieu
d'autres gens que des malins, des canailles4 et des imbéciles. Avant, nous
étions souillés par l'envahisseur. Maintenant, nous sommes souillés par
nous-mêmes; nous n'avons fait que changer de drame. Ah! pourquoi ne

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suis-je pas mort à Grenade5 quand ma patrie était encore intacte? Pourquoi
ai-je survécu à ma patrie? Pourquoi est-ce que je vis?

BERNAL. — Mon ami, qu'avez-vous? Vous ne nous avez jamais parlé de
la sorte.

ALVARO. — Le collier des chevaliers de Chypre était orné de la lettre S,
qui voulait dire: «Silence». Aujourd'hui, tout ce qu'il y a de bien dans notre
pays se tait. Il y a un Ordre du Silence: de celui-là aussi je devrais être
Grand Maître. Pourquoi m'avoir provoqué à parler?

OLMEDA. — Faites-vous moine, don Alvaro. C'est le seul état qui vous
convienne désormais.

ALVARO. — Je ne sais en effet ce qui me retient, sinon quelque manque
de décision et d'énergie.

OBREGON. — Et j'ajoute qu'il y a plus d'élégance, quand on se retire du
monde, à s'en retirer sans le blâmer. Ce blâme est des plus vulgaires!