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Курс французского языка 4 том Г. Може; (стр. 38 из 81)

ANATOLE FRANCE. Crainquebille (1901).

On devine la suite: le pauvre Crainquebille finira par tomber sous le coup d'outrages à
agent et passera en "correctionnelle", c"est-à-dire devant le tribunal de première instance
et sera condamné à quinze jours de prison.

Примечание:

1. Проходите (жаргон полицейских).
Вопросы:

* Expliquez cette distinction entre le droit individuel et le devoir social. Dans quelle
mesure et dans quelles circonstances le premier doit-il s'incliner devant les exigences du
second?

** En quoi consiste, ici, la satire? Et, plus généralement, comment s'exprime iitoaie de
l'auteur dans tout ce récit?
Certains tours dénotent un écrivain raffiné. Montrez que
cependant Anatole France a su rendre le langage du peuple.

RIVALITÉ D'INDUSTRIELS

Si l'industrie française, pour faire face à la concurrence étrangère, a souvent
dû, de nos jours, se constituer en trusts et en cartels, elle fut longtemps dirigée
par des hommes qui entendaient rester maîtres de. leur affaire et qui la.
géraient comme un bien strictement personnel, ou, tout au plus, familial. C'est
ce type de patrons qu'ANDRÉ MAUROIS, lui-même fils de drapiers d'Elbeuf, a fait
revivre, non sans humour, dans son roman Bernard Quesnay.

M. Achille, vieillard de soixante-douze ans, et fort riche, faisait de
l'industrie comme les vieux Anglais font du golf, avec dévotion. A la
question de son petit-fils: «Pourquoi passer une vie brève à fabriquer des
tissus?» il aurait sans doute répondu: «Pourquoi vivre si l'on n'en fabrique
pas?» Mais toute conversation qui ne traitait pas de la technique de son
métier n'était pour lui qu'un bruit négligeable.

209


Descendant de fermiers qui s'étaient faits tisseurs au temps du premier
Empire, M. Achille gardait de cette origine paysanne un besoin violent de
travail et une méfiance incroyable. Ses maximes étonnaient par un mépris
sauvage des hommes. Il disait: «Toute affaire que l'on me propose est
mauvaise, car si elle était bonne on ne me la proposerait pas». 11 disait
aussi: «Tout ce qu'on ne fait pas soi-même n'est jamais fait». «Tous les
renseignements sont faux.»

La brutalité de ses réponses épouvantait les courtiers en laine, dont les
mains tremblaient en ouvrant devant lui leurs paquets bleus. Il ne croyait
pas que l'amabilité et la solvabilité fussent des vertus compatibles. A client
flatteur il coupait le crédit. Avec les étrangers, qu'il appelait des
«exotiques», sans distinguer d'ailleurs les Européens des Canaques, il se
refusait à tout commerce.

Comme tous les grands mystiques, M. Achille menait une vie austère.
Le luxe était à ses yeux le premier des signes de l'indigence. Dans les
femmes, il ne voyait que les tissus dont elles s'enveloppaient. Dans sa
bouche, le: «Je tâte votre habit, l'étoffé en est moelleuse»1, eût été naïf et
sans arrière-pensée. Privé du cliquetis de ses métiers, il dépérissait aussitôt.
Il ne vieillissait que le dimanche, et des vacances l'auraient tué. Ses deux
seules passions étaient l'amour des «affaires» et la haine qu'il portait à M.
Pascal Bouchet, son confrère et concurrent*.

Les hauts toits rouges des usines Quesnay dominaient le bourg de Pont-
de-1'Eure, comme une forteresse le pays qu'elle protège. A Louviers, petite
ville distante seulement de quelques lieues, les usines Pascal Bouchet
alignaient au bord de l'Eure leurs nefs râblées et tortueuses.

En face de l'industrie impériale des cartels allemands, cette industrie
française d'avant-guerre demeurait féodale et belliqueuse. De leurs
châtea.ux forts voisins, les deux fabricants de la Vallée se faisaient une
guerre de tarifs et la souhaitaient meurtrière.

Un négociant qui disait à M. Achille: «Bouchet vend moins cher», lui
faisait aussitôt baisser ses prix. Un contremaître de M. Pascal qui
annonçait: «On me demande chez Quesnay», était augmenté à la fin du
mois. Cette lutte coûtait cher aux deux maisons ennemies. Mais M. Pascal
Bouchet, semblable en cela à M. Achille, considérait l'industrie comme un
sport guerrier et ne parlait qu'avec orgueil des coups reçus dans les
campagnes saisonnières.

«Pascal!., disait M. Achille, après chaque inventaire... Pascal est un fou
qui se ruinera en deux ans.» II le disait depuis trente-cinq ans**.

ANDRÉ MAUROIS. Bernard Çuesnay (1926).
210 ,


Примечания:

1. Это слова Тартюфа, обращенные к Эльмире ("Тартюф" Мольера).

Вопросы:

* Étudiez la psychologie d'Achille Quesnay. Montrez quels ravages la déformation
professionnelle a opérés clans son esprit.

** Sur quel ton l'auteur présente-t-il ses personnages? Relevez les nombreuses traces
d'ironie contenues dans ce texte.

POUR UNE MÉDECINE HUMANISTE

RENÉLERICHE (1881-1955), fondateur de la Chirurgie physiologique, a été l'un
des plus grands praticiens de son temps. Mais il ne s'est pas appliqué
seulement à perfectionner la qualité scientifique et technique de son art.
N'oubliant jamais que l'homme est un «être de sentiment autant qu'œuvre de
chair»,
17 a voulu conserver à la médecine et à la chirurgie un caractère
profondément humain.

Pour ne pas se laisser aller à oublier l'intérêt du malade, pour ne pas
dépasser ce qui lui est permis, il faut que la chirurgie conserve le souci de
l'humain, le chirurgien demeurant le serviteur compréhensif et respectueux
de l'homme malade. Tout chirurgien doit avoir le sentiment profond du
respect dû par chacun de nous à la personne humaine.

Présence de l'homme dans la chirurgie, pourrait-on dire.

J'ai cherché un mot pour désigner ce que je voulais exprimer ainsi (...).
Celui d'humanisme s'est imposé à moi; humanisme: élan de l'homme vers
l'homme, souci de 1 individuel, recherche de chacun dans sa vente.

Je sais bien que dans la tradition de l'école, le mot d'humanisme a une
tout autre signification et ne devrait s'entendre que d'une attitude voulue de
l'intelligence. Mais, de nos jours mêmes, au terme d'une longue méditation,
la conception humaniste s'est affirmée plus large que jamais. Elle prend
désormais pour objet l'homme tout entier, l'homme individu, dans les
œuvres de son esprit, dans les mouvements de son intelligence et de son
cœur, dans ses inquiétudes, ses espoirs, ses désespérances, dans son
aspiration faustienne' à la vie. C'est donc bien un courant de pensée que
l'on peut faire passer au travers de la chirurgie.

En fait, cet humanisme, c'est celui que tout médecin sent s'éveiller en lui
au contact de la souffrance et de la misère des hommes.

211


C'est lui qui permet au chirurgien d'être proche du malade tourmenté,
proche sans effort, sans mot appris dès que la maladie fait affleurer ce
tréfonds de vie secrète où la psychanalyse a trouvé matière à tant
d'explorations révélatrices. C'est lui seul qui peut maintenir la chirurgie
dans sa ligne droite, car il est la seule éthique3 qui puisse fixer, pour
chacun de nous, la limite des droits et l'étendue des devoirs.

Malheureusement, nos facultés de médecine ne s'en inquiètent guère.
Elles n'enseignent pas cette science de l'homme total (...). Sans doute,
à l'hôpital, chaque jour, des maîtres de haute conscience prêchent
l'humanisme par leur exemple. Mais le cadre de leurs leçons vécues est
parfois tellement inhumain que l'idée se dilue. Dans nos hôpitaux, tout
choque l'humanisme: la promiscuité des corps, la violation des intimités
secrètes, l'impudeur des voisinages, le contact permanent avec la
soufftance, l'indifférence devant la mort.

Aussi peut-on aborder la chirurgie sans en avoir compris la valeur
humaine, sans être moralement préparé à ce qu'elle impose. Et c'est là d'où
vient le danger.

Sans doute, les médecins sont généralement imprégnés de cette culture
classique qui aide tant à comprendre l'homme, mais à l'âge où il est mis en
contact avec la pensée antique, le futur médecin est trop jeune pour en
saisir la signification réelle. Et c'est plus tard, de lui-même, que, sensible à
la misère des hommes, le médecin trouve au lit du malade le sens véritable
de sa profession. Certes, la plupart des médecins sont des humanistes, mais
peut-être serait-il bon qu'on ne laisse pas attendre à chacun d'eux les
messages de l'expérience.

C'est pourquoi il y a lieu de dire les devoirs que la pensée humaniste
impose aux chirurgiens, pour que la chirurgie soit vraiment à la mesure de
l'homme*.

RENÉ LERICHE. La Philosophie de la Chirurgie (1951).
Примечания:

1 В фаустовском гepoe средневековой легенды, на основе которой Гете написал своего
"Фауста" 2. Выхолит на поверхность эгих таинственных глубин 3. Единственная мораль

Вопросы:

* D après cette page montrez que la médecine est une éthique non moins qu'une science.
212


PILOTE DE LIQNE

Tout le monde connaît le nom de Blériot, de Guynemer, de Pelletier d'Oisy, de
Mermoz, de Clostermann, de tous les aviateurs enfin que des raids
spectaculaires ou des services de guerre éclatants ont placés en vedette. Mais il
est d'autres pilotes, ceux qui se consacrent au transport des voyageurs ou du
courrier, dont la vie, pourtant si souvent mise en péril, est ignorée du grand
public.

C'est pour ces héros méconnus que SAINT-EXUPÉRY, avant de disparaître au
cours d'une reconnaissance, en 1944, a écrit ses fameux romans Vol de Nuit et
Terre des Hommes.

La femme du pilote, réveillée par le téléphone, regarda son mari et
pensa:

«Je le laisse dormir encore un peu».

Elle admirait cette poitrine nue, bien carénée1, elle pensait à un beau
navire.

Il reposait dans ce lit calme, comme dans un port, et, pour que rien
n'agitât son sommeil, elle effaçait du doigt ce pli, cette ombre, cette houle2,
elle apaisait ce lit, comme, d'un doigt divin, la mer.

Il ouvrit les yeux.

«Quelle heure est-il?

— Minuit.

— Quel temps fait-il?

— Je ne sais pas...»

II se leva. Il marchait lentement vers la fenêtre en s'étirant.
«Je n'aurai pas très froid. Quelle est la direction du vent?

— Comment veux-tu que je sache...»
Il se pencha:

«Sud. C'est très bien. Ça tient au moins jusqu'au Brésil.»

Il remarqua la lune et se connut riche*. Puis ses yeux descendirent sur
la ville. Il ne la jugea ni douée, ni lumineuse, ni chaude. Il voyait déjà
s'écouler le sable vain de ses lumières3.

«A quoi penses-tu?»

Il pensait à la brume possible du côté de Porto Alegre.

« J'ai ma tactique. Je sais par où faire le tour... »

II s'inclinait toujours. Il respirait profondément, comme avant de se
jeter, nu, dans la mer.

«Tu n'es même pas triste... Pour combien de jours t'en vas-tu?» Huit, dix
jours. Il ne savait pas. Triste, non; pourquoi?

213


Ces plaines,сes villes, ces montagnes... Il partait libre, lui semblait-il,
à leur conquête, II pensait aussi qu'avant une heure il posséderait et
rejetterait Buenos Aires4

Il sourit:

«Cette ville... j'en serai si vite loin. C'est beau de partir la nuit. On tire
sur la manette des gaz, face au Sud, et dix secondes plus tard on renverse le
paysage, face au Nord. La ville n'est plus qu'un fond de mer.» Elle pensait
à tout ce qu'il faut rejeter pour conquérir**.

«Tu n'aimes pas ta maison?

— J'aime ma maison...»

Mais déjà sa femme le savait en marche. Ces larges épaules pesaient
déjà contre le ciel.

Elle le lui montra.

«Tu as beau temps, ta route est pavée d'étoiles.»

Il rit:

«Oui.»

Elle posa la main sur cette épaule et s'émut de la sentir tiède: cette chair
était donc menacée?..
«Tu es très fort, mais sois prudent!

— Prudent, bien sûr...»
Il rit encore.

Il s'habillait. Pour cette fête, il choisissait les étoffes les plus rudes, les
cuirs les plus lourds, il s'habillait comme un paysan. Plus il devenait lourd,
plus elle l'admirait.

Elle-même bouclait cette ceinture, tirait ces bottes.

«Ces bottes me gênent.

— Voilà les autres.

— Cherche-moi un cordon pour ma lampe de secours.»

Elle le regardait. Elle réparait elle-même le dernier défaut dans l'armure:
tout s'ajustait bien.
«Tu es très beau.»

Elle l'aperçut qui se peignait soigneusement.
«C'est pour les étoiles?

— C'est pour ne pas me sentir vieux.

— Je suis jalouse...»

Il rit encore, et l'embrassa, et la serra contre ses pesants vêtements. Puis
il la souleva à bras tendus, comme on soulève une petite fille, et, riant
toujours, la coucha:

«Dors!»

214


Et fermant la porte derrière lui, il fit dans la rue, au milieu de
l'inconnaissable peuple nocturne, le premier pas de sa conquête.

Elle restait là. Elle regardait, triste, ces fleurs, ces livres, cette douceur,
qui n'étaient pour lui qu'un fond de mer***.

A. DE SAINT-EXUPÉRY. Vol de Nuit (1932).
Примечания:

1. Обтекаемой формы, как корпус корабля. 2. Морщины на простыне сравнивают-
ся с зыбью на море. 3. Огни города исчезнут из его глаз, когда он взлетит (фраза по-
строена на фразеологическом обороте avoir du sable dans les yeux). 4. Будет обладать
городом сверху, а затем вновь оставит его, взлетев.

Вопросы:

* Expliquez pourquoi.

** Qu'y a-t-il de sain, de tonique, dans cette formule?

*** Comment s'exprime, dans cette page, la tendresse de l'épouse?

L'HOMME DE THÉÂTRE